Séminaire École doctorale — "Où est passée la théorie ?"
SéminaireProblématique du séminaire
Divers phénomènes semblent actuellement indiquer une désaffection à l’égard de la théorie, tant dans nos disciplines et la recherche qui s’y effectue, que plus généralement dans les pratiques, représentations et discours ordinaires actuels. Cette tendance s’affirme de diverses manières : à travers la préférence pour le particulier ou pour l’échelle « micro », comme en témoignent la micro-sociologie ou la micro-histoire, à travers le primat de la description sur d’autres formes de discours, voire à travers l’intérêt porté au caractère ordinaire des objets et des savoirs qui n’autoriserait pas de discours théorique ou savant.
Sur le plan méthodologique, une telle tendance peut manifester une forme de néo-positivisme, privilégiant le « donné » de l’archive ou de l’artefact à l’activité théorique, jugée irréductiblement détachée de l’expérience et de sa description. Enfin, elle peut aboutir, dans certaines disciplines, à l’abandon des grandes théories globales (comme le suggère la dénonciation par Antoine Compagnon du « démon de la théorie »), voire à l’abandon de toute ambition totalisante du savoir. Ce mouvement de méfiance et de fragmentation, qui amène à préférer les théories à la théorie puis le terrain aux théories, ne conduit-il d’ailleurs pas à privilégier les épistémologies situées à la science, voire à la notion de vérité (voir Étienne Klein, Allons-nous liquider la science ?) ?
Bien entendu, un diagnostic si général exige immédiatement une distance critique, notamment parce que la déconstruction des théories globales donne souvent lieu à une construction… théorique. Le rapport à la théorie n’est donc pas univoque et mérite lui-même d’être enquêté. Cette enquête sur la théorie est au cœur de ce séminaire doctoral qui l’abordera dans le domaine des humanités et des sciences sociales. L’objectif, méthodologique et pédagogique, est clairement de permettre aux doctorantes et aux doctorants de se positionner par rapport à la théorie afin d’éviter chez eux – et chez tous les chercheurs – tout rejet craintif ou toute révérence vaine. Il s’agira de susciter et favoriser leur réflexivité en montrant la théorie à l’œuvre, en éclairant ses réussites et ses impasses, en suggérant des analogies, en fournissant certaines typologies utiles pour la maîtrise de leurs propres recherches. La perspective sera collective et pluridisciplinaire, afin de repérer des problèmes qui pourraient être communs à plusieurs disciplines, qu’il s’agisse de la question de la rivalité des théories ou de la question des emprunts réalisés par un chercheur de telle discipline à des théories relevant d’un autre champ disciplinaire, voire de l’enjeu moral et politique de certaines théories.
Pour la seconde année, le séminaire portera plus spécifiquement sur les usages publics de la théorie afin de permettre aux doctorantes et aux doctorants – ainsi qu’à tous les chercheurs participants – de mieux aborder les débats parfois polémiques sur la place des humanités et des sciences sociales. La dimension internationale sera particulièrement explorée à cette occasion.
Vendredi 7 avril 2023
9 h 30-12 h 30
Modération par un doctorant (à déterminer)
Isabelle OST (centre Prospéro, USaint-Louis de Bruxelles), Un « Spatial Turn » en littérature : quel intérêt la cartographie revêt-elle pour la théorie littéraire ?
Mélissa GIGNAC (CEAC ULille), Peut-on théoriser en historicisant ? L’exemple de la mise en scène au cinéma
Présentation des travaux des doctorants : Nordine Oscar Goia Monteiro
14 h-17 h
Modération par Samy BOUNOUA, doctorant (IRHiS, ULille)
Gabriel GALVEZ-BEHAR (IRHiS, ULille), L’histoire et le « souci des idées et des théories » de Berr à Febvre
Florence HULAK (LabTop-Cresspa, UParis 8), Où est passée la théorie sociologique dans l’histoire des Annales ?
Vincent GENIN (GSRL, EPHE-Paris), L’Éthique protestante de Max Weber, un rendez-vous manqué des historiens français (1905-1979) ?
Tour de table avec les doctorants
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